Conférence thérapeutique annuelle CHDI - Cinquième session du 29 février 2024

Que se passe-t-il en clinique ?
Mis en ligne le 26 avril 2024


La dernière session de la matinée couvre les mises à jour de différents essais cliniques.

David Margolin : essai de Phase 1/2 en cours portant sur le médicament AMT-130 de la compagnie UniQure

Tout d’abord une mise à jour de David Margolin de la compagnie UniQure s’agissant de leur essai de Phase 1/2 en cours portant sur le médicament AMT-130, une thérapie génique pour diminuer la protéine huntingtine impliquant une chirurgie cérébrale afin d’administrer le médicament aux zones profondes du cerveau qui sont affectées par la maladie de Huntington. Le médicament est empaqueté dans un virus inoffensif, injecté dans des zones spécifiques du cerveau par l’intermédiaire d’une chirurgie bien contrôlée. Il s’agit d’une thérapie unique, de sorte que les personnes ne subiront l’opération chirurgicale qu’une seule fois et ensuite leur taux de huntingtine devraient diminuer de manière permanente.

C’est passionnant car cela signifie que si le médicament agit, il pourrait être une approche unique. D’un autre côté, si les choses ne se passent pas comme on l’espère, cela pourrait être une mauvaise nouvelle C’est pour cette raison que la société UniQure a réalisé une tonne de tests d’innocuité sur toutes sortes d’animaux MH et leurs essais chez l’homme se déroulaient très lentement afin de s’assurer que tout allait bien.

La compagnie UniQure mène deux essais en même temps aux Etats-Unis et en Europe. Les deux essais testent une dose élevée et une dose faible du médicament mais seul l’essai américain comporte un bras placebo – les personnes subissent l’opération chirurgicale mais ne reçoivent pas le médicament.

David résume les résultats de la question la plus importante à laquelle cet essai doit répondre : si le médicament est sûr et tolérable. Le médicament semble généralement  être sûr et les effets secondaires qui sont survenus ont pu être gérés par un traitement.

La compagnie UniQure a ensuite exploré les résultats préliminaires, se demandant si le médicament pourrait avoir des effets bénéfiques sur le ralentissement des signes et symptômes de la maladie de Huntington. Les choses semblent aller bien mais c’est difficile à dire car peu de personnes participant à l’essai ne prennent ce médicament depuis très longtemps. On ne peut donc pas s’attendre à une différence concluante. Les autres évaluations examinées par la compagnie UniQure étaient également correctes, et il y aurait peut-être des effets positifs … Cependant, il est trop tôt pour en être sûr compte tenu du si petit nombre de personnes participant à l’essai.

Le message clé est que rien de vraiment grave n’est survenu chez les personnes ayant reçu le médicament. Ceci est très important puisqu’il s’agit de la première thérapie génique dans le cadre de la maladie de Huntington à être mise en clinique et les scientifiques n’ont que très peu d’idées sur la façon dont une thérapie unique, comme celle-ci, pourrait fonctionner chez des personnes atteintes de la MH. David a partagé l’information selon laquelle la compagnie UniQure aura une autre mise à jour avec davantage de données au mois de juin.

Amy-Lee Bredlau : mise à jour de la compagnie PTC Therapeutics s’agissant de l’essai de Phase 2 portant sur le médicament PTC-518

Amy-Lee Bredlau de la compagnie PTC Therapeutics a partagé une mise à jour sur l’essai de Phase 2 portant sur le médicament PTC-518, un médicament pris par voie orale afin de diminuer la huntingtine.

Ce médicament, que développe la compagnie PTC Therapeutics, est appelé un modulateur de l’épissage, lequel permet de diminuer la huntingtine en ciblant la copie de son message et en envoyant la molécule message dans la poubelle de la cellule afin que la protéine huntingtine ne soit pas fabriquée.

Avant de tester ce médicament chez l’homme, la compagnie PTC l’a testé pour savoir s’il pourrait diminuer la huntingtine chez différents modèles cellulaires de la MH, ainsi que dans les cerveaux de souris modélisant la maladie de Huntington. Ils ont constaté des taux de huntingtine plus faibles dans le sang et le cerveau – c’est important car faire agir des médicaments dans le cerveau peut être très délicat.

La prochaine étape consiste à tester si le médicament est sans danger chez l’homme, ce qu’ils font dans le cadre de l’essai PIVOT-HD. La compagnie PTC est l’une des premières compagnies à adopter le système de stadification intégrée de la maladie de Huntington - HD-ISS et à recruter dans leurs essais des personnes étant aux stades 2 et 3 de la maladie.

Les personnes participant à l’essai ont reçu 5 ou 10 mg du médicament alors que d’autres n’ont reçu qu’un placebo. L’étude se déroule en Amérique du Nord, en Europe et en Australie. On a eu connaissance des données provisoires provenant d’un petit groupe de seulement 33 personnes participant à l’essai. Il semble que le médicament soit plutôt sûr et qu’il n’y ait eu aucun changement dans les niveaux de NfL – un biomarqueur qui nous renseigne sur la santé globale du cerveau.

Ce qui est important, c’est qu’ils constatent que les taux de huntingtine ont diminué dans le sang dans une manière dose-dépendante, ce qui signifie que les personnes ayant reçu davantage de médicament ont présenté une diminution de la huntingtine plus importante. Aucune donnée n'a montré si une diminution se produit dans le système nerveux central, comme le cerveau ou le liquide dans lequel baigne le cerveau, mais on espère que la compagnie PTC partagera cela dans sa prochaine mise à jour officielle, qui est promise bientôt.

Peter McColgan, Jonas Dorn, and Marcelo Boareto de l’entreprise pharmaceutique Roche

Il y a ensuite deux interventions de trois scientifiques : Peter McColgan, Jonas Dorn, et Marcelo Boareto de l’entreprise pharmaceutique Roche.

Peter commence par se concentrer sur les biomarqueurs dans le liquide céphalo-rachidien, le liquide dans lequel baigne le cerveau. Les taux des différentes protéines biomarqueurs découvertes dans ce liquide peuvent donner des informations sur les différents aspects de la santé cérébrale. Peter et des personnes de l’entreprise Roche examinent ces biomarqueurs provenant du liquide céphalo-rachidien qu’ils ont collecté lors de l’essai clinique GENERATION-HD1, lequel a été malheureusement interrompu en 2021 en raison de problèmes de sécurité. Cet essai a testé un médicament diminuant la huntingtine, Tominersen.

Les personnes qui ont reçu une faible dose du médicament Tominersen avaient des taux de huntingtine plus bas mais des niveaux stables de NfL, YKL-40 et d’autres marqueurs de la santé cérébrale. Les personnes ayant reçu beaucoup plus de médicament avaient davantage de diminution de la huntingtine mais présentaient une augmentation des taux de NfL et des marqueurs cérébraux indiquant que le cerveau était malade. Ces résultats ont permis à l’entreprise Roche de décider les doses à utiliser dans leur essai en cours pour le médicament Tominersen, GENERATION-HD2, afin d’obtenir de bon niveaux de diminution de la huntingtine mais sans rendre malades les cellules cérébrales. L’essai GENERATION-HD2 est en bonne voie sur de nombreux sites à travers le monde et a désormais recruté plus de 50% de participants.

Des biomarqueurs numériques, tels qu’une application mesurant la vitesse de frappe du doigt ou le dessin de formes, permettent de collecter des données chaque jour, pas seulement lorsqu’une personne se rend à l’hôpital pour des tests. Jonas explique comment ces évaluations fréquentes de biomarqueurs numériques peuvent fournir une image différente de l’état de santé des personnes et de la manière dont la progression de leur maladie pourrait être affectée par le médicament.

A l’avenir, cela pourrait permettre d’obtenir la même quantité d’informations auprès de petits groupes de personnes, de sorte que de nombreux essais différents pourraient avoir lieu plus rapidement et permettre aux chercheurs d’accéder plus rapidement à des traitements dans le cadre de la maladie de Huntington. Jonas et son équipe comparent les biomarqueurs numériques qu’ils ont évalués avec d’autres mesures traditionnelles, telles que l’imagerie cérébrale. Ils ont constaté certains résultats prometteurs ! Les données suggèrent que ces biomarqueurs numériques sont des mesures fiables s’agissant de l’évolution de la MH.

Dans la triple proposition de l’entreprise Roche, Marcelo Boareto a parlé des études d’histoire naturelle. Ces études ne testent pas les effets d’un médicament mais suivent plutôt des personnes atteintes de la MH, ainsi que des personnes saines, afin de voir comment la maladie progresse avec l’âge. Les études d’histoire naturelle aident les chercheurs à comprendre à quoi s’attendre en termes de changements dans la trajectoire de la maladie lors d’essais cliniques MH. Plus les scientifiques comprennent l’évolution normale de la MH, plus ils peuvent évaluer si un médicament modifie la progression de la MH et s’il peut être utile pour les personnes atteintes de la MH.

Pour de nombreuses évaluations, les personnes du groupe placebo de l’essai GENERATION-HD1, qui ne prenaient pas le médicament, semblaient initialement s’améliorer. Mais ensuite, ils ont suivi la même évolution que celle à quoi on pourrait s’attendre de l’étude d’histoire naturelle – l’effet placebo peut être fort ! Maintenant que l’entreprise Roche a analysé l’effet placebo et comment il se compare à la progression naturelle de la maladie, ces informations peuvent être utilisées pour mieux concevoir de futurs essais en prenant en considération l’effet placebo.

Swati Sathe : mise à jour de l’étude d’histoire naturelle SHIELD-HD

Swati Sathe de la Fondation CHDI a partagé les données de l’étude SHIELD-HD, une étude d’histoire naturelle lancée par la compagnie Triplet Therapeutics. Ils travaillaient sur l’instabilité somatique mais cette compagnie a malheureusement fermé ses portes.

Cette étude a été conçue pour examiner les personnes atteintes de la maladie de Huntington avant qu’elles ne commencent à présenter des symptômes et les suivre pendant 120 semaines. Ils ont collecté de nombreux échantillons différents auprès des personnes participant à l’étude, tels le liquide céphalo-rachidien, le sang et des IRMs. Le principal objectif de cette étude était de comprendre comment le nombre de répétitions CAG change au fil du temps et de suivre l’évolution de la MH avec différents échantillons collectés et tests effectués. L’étude a été menée sur neuf sites dans cinq pays différents.

Après la fermeture de la compagnie Triplet Therapeutic, la Fondation CHDI (qui accueille cette conférence) a repris l’étude afin de s’assurer que ces précieux échantillons et toutes les données recueillies jusqu’à présent ne soient pas gaspillés et soient utilisés afin d’aider à éclairer de futurs essais. Le système de stadification HD-ISS a également été utilisé dans cette étude. Son intégration dans des essais cliniques et des études d’histoire naturelle aidera les chercheurs à cibler des stades spécifiques de la maladie pour, espérons-le, faire progresser les médicaments plus rapidement en les adaptant aux personnes qui en bénéficieront le plus.

L’équipe de la Fondation CHDI a étudié quelles mesures ont changé au cours de l’étude, telles que les scores des tests moteurs, le volume des zones cérébrales vulnérables et autres mesures métriques. Ils ont également comparé leurs données avec celles d’autres études, telles que celles de l’étude TRACK-HD. La grande richesse des données générées par tous les participants de l’étude SHIELD-HD permettra de déterminer quels tests et quelles évaluations sont les meilleurs pour être utilisés pendant la durée d’un essai médicamenteux afin d’avoir les meilleurs chances de détecter si un traitement fonctionne.

Traduction Libre (Dominique C . - Michelle D.)

Source :   - Article des Dr. Rachel Harding - Dr Sarah Hernandez et Dr. Léora Fox du 7 mars 2024